Jean-Marc Demers
06-07-2021
|Nouvelles

Disparition des cookies tiers : quelles solutions pour les annonceurs?

En 2020, Google bouleversait l’industrie publicitaire en annonçant la disparition des cookies tiers sur son navigateur Chrome d’ici 2022, emboîtant le pas à Apple, Mozilla et autres entreprises en ayant déjà limité l’utilisation.

Cookies tiers

À l’approche de la date fatidique, Google s’est finalement rétractée en reportant le changement à la fin de 2023, offrant ainsi plus de temps aux éditeurs et annonceurs pour adapter leurs pratiques à la nouvelle réalité.

Malgré ce sursis, il est déjà temps pour les professionnels du marketing d’imaginer le futur de la publicité numérique et de trouver des solutions de ciblage alternatives pour préparer la transition.

Dans cet article, nous faisons un tour d’horizon sur la place des cookies tiers dans l’espace publicitaire et les différentes possibilités qui s’offriront à vous pour continuer à annoncer sur le web.

 

Que sont les cookies tiers? 

Les cookies sont des petits bouts de code qui se placent dans le navigateur des internautes lorsqu’ils visitent un site. Ceux-ci fournissent de l’information sur l’utilisateur (type de navigateur, appareil, langue, etc.) et son comportement en ligne.

Deux différents cookies sont mis sur le navigateur : un cookie interne (de première partie) et un cookie tiers.

Les cookies internes sont créés et utilisés par le site visité par l’individu. Les cookies tiers, quant à eux, sont placés par un autre site ou une autre application. Leur but est de suivre l’internaute sur tous les autres sites qu’il consultera par la suite. Cet espionnage permet de mieux comprendre son comportement et ses intérêts afin de lui servir des publicités hautement personnalisées.  Par exemple, une chaîne hôtelière pourrait savoir que vous vous apprêtez à voyager et vous envoyer des publicités ciblées parce que vous avez récemment acheté un billet d’avion sur un autre site.

C’est ce qui explique pourquoi vous recevez régulièrement des publicités de marques dont vous n’avez peut-être jamais entendu parler.

Vous comprenez sans doute les enjeux éthiques soulevés par une telle pratique. La disparition les cookies tiers aurait donc pour objectif de mieux protéger la vie privée des utilisateurs – c’est à tout le moins la raison exprimée par Google.

 

 

Qu’est-ce qui va changer, concrètement? 

Ainsi, il ne sera plus possible de surveiller le comportement des utilisateurs sur les sites autres que ceux qu’ils auront visité.

Les marques ne pourront également plus acheter de données obtenues par des cookies tiers, ce qui constitue la presque totalité des données utilisées par les Data Management Platform (DMP) en publicité programmatique. Ces fournisseurs devront revoir leur offre ou ils seront voués à disparaître.

cookies tiers

Si l’utilisation de cookies de première partie sera toujours autorisée, les sites devront toutefois demander la permission aux gens pour récolter leurs données. Bien que ce projet de loi ne soit pas directement lié avec la disparition des cookies tiers, nous pouvons nous attendre à le voir entrer en vigueur durant la même période.

Plusieurs changements s’annoncent, mais il sera toujours possible de cibler efficacement les consommateurs tout en respectant leur vie privée. Déjà, quatre grandes pistes de solutions se dessinent pour les annonceurs.

ciblage publicitaire sans cookies

1. L’utilisation des données de première partie 

Avec la disparition des données de tierce partie, les données de première partie prendront une place centrale dans la stratégie des marques.

Celles-ci comprennent toutes les informations que vous collectez vous-mêmes directement auprès de votre audience (comportement sur le site, données transactionnelles, données du CRM, informations des comptes clients, liste de courriels, etc.).

Vous possédez sans doute déjà toutes ces informations, mais les exploitez-vous à leur plein potentiel?

Un outil permettant d’unifier toute ces données de première partie gagnera en popularité au cours des prochaines années : la plateforme de données client (Customer Data Platform, ou CDP).

Il s’agit d’un logiciel qui collecte et consolide toutes les données de première partie afin de créer des profils unifiés pour chaque consommateur. Éventuellement, les CDP pourront aussi croiser ces informations avec des données de seconde partie.

Avec la disparition des cookies tiers, plusieurs annonceurs craignent que le ciblage publicitaire ne soit plus aussi précis qu’avant. La question du consentement demeure également. Comment récolter des données de première partie si les utilisateurs refusent les cookies?

En fait, chez Braque, nous estimons que la disparition des cookies tiers pourrait, au contraire, permettre un ciblage plus pertinent.

Il faut comprendre que le ciblage avec les cookies tiers est uniquement basé sur le fait qu’un utilisateur a visité un site. Or, l’individu est peut-être atterri sur cette page par erreur. Il a peut-être déjà acheté le produit dont il a besoin. Les annonceurs dépensent régulièrement des centaines de dollars pour être vus par des gens qui n’ont jamais eu d’intention d’achat envers leur produit.

Les cookies première partie changent la donne, car les consommateurs les acceptant manifestent explicitement leur intérêt envers la marque. Tous les profils dans votre CDP appartiendront à des individus qui souhaitent probablement être ciblés par vous.

Si le consentement aux cookies vous inquiète, il est bon de savoir qu’en Europe, depuis l’entrée en vigueur du RGDP en 2018, le taux de consentement a grimpé en flèche. Alors qu’il était à environ 30 % au début, la moyenne se situe maintenant à 85 %, allant à 98 % sur certains sites (Quantcast).

 

2. Le ciblage contextuel 

Ce changement s’avèrera un retour aux sources pour plusieurs publicitaires d’expérience, mais il faut dire que le ciblage contextuel s’est beaucoup raffiné au cours des dernières années. Il offre maintenant des options très intéressantes aux annonceurs.

Avant, si un vendeur de voitures de luxe cherchait à rejoindre des clients potentiels, il affichait simplement sa publicité sur un site lié au sujet (exemple : Car and Driver) et se croisait les doigts pour que sa cible passe par là.

Aujourd’hui, il serait possible d’afficher la publicité partout sur Internet, sur les pages présentant du contenu pertinent sur les voitures, et de cibler uniquement les gens qui consultent ces pages le samedi matin, à la maison, sur un appareil mobile dernier cri.

Pourquoi ces critères? Parce que nous savons que cet individu est intéressé à acheter une nouvelle voiture, qu’il est disposé à s’informer (puisqu’il est chez lui, tranquille, un samedi matin) et qu’il a probablement un revenu élevé.

Une avancée intéressante dans le domaine est le ciblage sémantique qui, grâce à une analyse textuelle, visuelle et sonore approfondie, parvient à mieux comprendre les éléments de contexte de chaque page web. La publicité apparaît donc uniquement sur les pages dont le contenu est véritablement lié à celui de l’annonce. Elle permet d’éviter certains sujets ou opinions de façon beaucoup plus efficace que les whitelists et les blacklists.

 

3. Les identifiants universels 

Les Universal IDs (ou identifiants universels), sont des identifiants uniques partagés entre les membres d’un réseau constitué de plusieurs acteurs de l’industrie. Ce système fonctionne selon le principe qu’un utilisateur donne son consentement à un ensemble de publicitaires, médias et autres afin d’être suivi sur le web d’une façon qui respecte sa vie privée, le tout en échange du contenu gratuit qui lui est offert sur les sites qu’il visite.

Un exemple d’identifiant unique est Unified ID 2.0, qui rassemble des dizaines de médias, SSP (Supply-side Platform), firmes de recherche, DSP (Demand-side Platform) et leaders de l’industrie. Un individu possède donc le même identifiant unique sur toutes ces plateformes.

Quand il s’inscrit à un site membre du groupe, il donne la permission à toutes les autres d’avoir accès à son identifiant et aux données sur son comportement sur le web, un peu comme avec les cookies tiers.

Toutefois, ce système est beaucoup plus respectueux de la vie privée des consommateurs. En effet, l’identifiant unique est haché et crypté. Toutes les données sont anonymes et il est impossible d’identifier à quel individu elles appartiennent « dans la vraie vie », contrairement aux cookies. En plus, les utilisateurs peuvent contrôler comment leurs données sont utilisées lorsqu’ils accordent leur consentement.

 

4. Les walled gardens 

Un walled garden est un écosystème fermé dans lequel toutes les opérations sont contrôlées par l’exploitant de cet environnement. Toutes les données et la technologie restent dans l’écosystème.

Facebook, Google et Amazon en sont des exemples. Ces géants du web possèdent une quantité incroyable de données sur leurs utilisateurs et opèrent l’ensemble des campagnes publicitaires pour leurs clients à l’interne.

Puisque toutes leurs données sont de première partie et qu’elles ne sont jamais partagées avec les annonceurs, ils ne sont pas affectés par la disparition des cookies tiers.

Il s’agit donc d’une bonne nouvelle pour les annonceurs, qui pourront continuer à acheter des espaces sur ces plateformes au ciblage ultra précis.

Les walled gardens soulèvent tout de même des inquiétudes. Selon certains professionnels de l’industrie, ils encouragent la concentration de pouvoir et d’argent entre les mains d’une poignée de grands joueurs – rappelons que Google, Facebook et Amazon amassent à eux seuls près de 70 % de toutes les dépenses publicitaires sur le web (eMarketer). Les annonceurs craignent aussi un manque de transparence, puisqu’ils n’ont pas accès directement à tous les résultats des campagnes menées dans ces écosystèmes fermés.

Il demeure possible pour des plus petits éditeurs de développer leur walled garden, leur propre réseau publicitaire privé, mais leur ciblage sera moins précis que celui de Google ou d’Amazon, puisqu’ils possèdent beaucoup moins de données sur leurs utilisateurs que ces géants du web.

 

Nous espérons que cet article a réussi à vous faire appréhender la disparition des cookies tiers de façon un peu plus optimiste. Il est certain que ce changement demandera une période d’adaptation à toutes les marques, mais nous sommes de plus en plus enthousiasmés par les solutions existantes et celles qui seront prochainement développées par nos partenaires d’industrie.

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